• DEMARCHE

    DEMARCHE

     

    « Cette Chose, dont toutes les formes créées par l’homme sont du registre de la sublimation, sera toujours représentée par un vide précisément en ceci qu’elle ne peut pas être représentée par autre chose – ou plus exactement qu’elle ne peut qu’être représentée par autre chose. Mais dans toute forme de sublimation, le vide sera déterminatif ». (Jacques Lacan « La naissance de la psychanalyse », 1956)

     

    En 1968 Laurence Weiner énonce :

    « 1°) l’artiste peut réaliser la pièce,

    2°)la pièce peut être réalisée par d’autres,

    3°)la pièce ne doit pas forcément être réalisée.

     

    Yves Klein (1928-1962) fragilité, lumière, destinée brillante, vie éphémère, dévotion, sensualité et IKB.

     

    Monochromes, monogold, éponges, anthropométries, saut dans le vide et IKB.

     

    Se mettre sous le signe de « Yves le monochrome », ressort d’une sorte d’inconscience de ma part. Que faire devant le génie sinon se taire ? Et pourtant la parole permet le partage. Alors…

     

    Alors, parler d’Y.K. mais de ma démarche aussi car il ne me suffit pas de rêver sur l’inimitable bleu Klein.

    Pourquoi inimitable ? Parce que par delà les réalisations plastiques le bleu est l’outil d’une quête impossible, celle d’un absolu tel qu’Yves Klein s’y est épuisé en quelques années.

     

     

     

    Un ange passe.

     Un ange bleu bien sûr.

     

     

     

     « Le bleu n’a pas de dimension, il est hors dimension, tandis que les autres couleurs, elles, en ont. Ce sont des espaces pré-psychologiques (…). Toutes les couleurs amènent des associations d’idées concrètes (…) tandis que le bleu rappelle tout au plus la mer et le ciel, ce qu’il y a de plus abstrait dans la nature tangible et visible. »

     

    Donc, ce bleu du ciel que Klein le signe un jour d’été 1946 à Nice. Il signe « son nom de l'autre côté du ciel durant un fantastique voyage réalistico-imaginaire » (manifeste du Chelsea Hotel). Puis conscient de la gravité de son geste il attend la riposte de l’au-delà. De là sans doute sa dévotion à Sainte Rita de Cascia, la sainte des causes perdues ; de là, le merveilleux ex-voto bleu or et rose découvert en Italie vingt ans après la disparition de l’artiste.

     

     « Le bleu, le rose et l’or sont de même nature. Le troc au niveau de ces trois états est honnête » (conférence donnée à la Sorbonne)

     

    Le bleu du ciel, l’or de la transfiguration du réel, le rose de l’incarnation.

     

    Avant la mort de Dieu, l’art était une dévotion.

    Avant la disparition du mécène, l’art était une commande.

    Mais après la disparition locutoire du poète ?

     

    « L’immense erreur est de continuer à parler de l’objet, de « l’objet réel » comme s’il avait été, en un temps quelconque, la « fin » de l’œuvre d’art et n’avait pas toujours été le moyen : l’art, à toutes les époques, a toujours été non figuratif. Ce n’est pas là une nouveauté et il est étrange d’avoir à le rappeler. » (Jean Bazaine « Notes sur la peinture d’aujourd’hui » 1953, pages 47 et 48)

     

     

    1958 : galerie Iris Clert, « la spécialisation de la sensibilité à l’état matière première en sensibilité picturale stabilisée ».  (Exposition plus connue sous le titre /le vide/)

     

    Je passe de l’or  puis au bleu puis au rose dans mon tunnel puisque ces trois états sont de même nature. Je dématérialise l’objet (le tunnel) : je le partage et l’offre à qui veut. Mais il s’agit d’un troc en échange de l’objet offrez-moi une image, une idée une pensée … que nous pourrons partager sur ce blog.

     

     

     

    Autour de bleu de l’or et du rose bien sûr.